Déclaration orale au Parlement

Déclaration orale de la Ministre de l’Intérieur Theresa May sur la décision 2014

Déclaration orale de la Ministre de l’Intérieur à la Chambre des Communes sur la décision d’exemption des mesures européennes de police et de justice criminelle et sur la ré-adhésion aux mesures étant dans l’intérêt du Royaume-Uni.

Cela a été publié dans le cadre du 2010 to 2015 Conservative and Liberal Democrat coalition government
The Rt Hon Theresa May MP

Avec votre permission, Monsieur Le Président de la Chambre, je voudrais faire une déclaration sur la décision de savoir si le Royaume-Uni devrait s’exempter des mesures qui ont été prises à l’échelle de l’Union européenne en matière de police et de justice pénale avant l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne.

Comme le savent déjà les membres de cette Chambre, il s’agit là d’une décision individuelle que le gouvernement est tenu de prendre aux termes du Traité de Lisbonne avant le 31 mai 2014, avec effet à compter du 1er décembre de la même année. Cette décision va porter sur quelque 130 mesures, et le maintien de notre adhésion à certaines d’entre elles est manifestement dans l’intérêt de notre pays. Mais si nous entendons ne plus rester liés que par certaines de ces mesures, c’est pourtant sur leur totalité que nous devons exercer notre droit de nous exempter, avant de faire ce qu’il faut pour adhérer de nouveau à celles que nous considérons correspondre à notre intérêt national.

Le gouvernement s’est engagé à organiser un vote dans cette Chambre et à la Chambre des Pairs avant de se décider officiellement sur cette question. Nous entendons honorer pleinement cet engagement. C’est la semaine prochaine que les membres de cette Chambre auront l’occasion de débattre et de se prononcer sur cette approche. A la suite de nos pourparlers en Europe, un nouveau vote portera sur la liste finale des mesures auxquelles le Royaume-Uni fera une demande officielle de ré-adhésion.

Monsieur le Président, permettez-moi de tracer les grandes lignes de la façon dont laquelle le gouvernement a choisi d’aborder cette décision.

Lutter contre la criminalité transfrontalière et préserver la sécurité de notre pays

Nous sommes convaincus qu’il faut que le Royaume-Uni s’exempte des mesures en question pour des raisons de principe, de politique publique et de simple pragmatisme. Quant aux mesures auxquelles nous choisirions de ré-adhérer, il ne pourrait s’agir que de celles qui nous permettent de coopérer avec nos voisins européens dans la lutte contre la délinquance transfrontalière et de préserver la sécurité de notre pays.

Par principe, je suis fermement convaincue que les relations internationales du Royaume-Uni en matière de police et de justice pénale relèvent avant tout et de manière prédominante du gouvernement britannique. Pour ce qui est des politiques publiques, le Royaume-Uni conserve – et va conserver – la possibilité d’adopter ou non toute nouvelle proposition dans les domaines de la justice et des affaires intérieures. Par conséquent, nous sommes légitimement en droit de saisir l’occasion de décider de maintenir ou non les mesures auxquelles a adhéré le précédent gouvernement, et de décider cas par cas si nous entendons autoriser la Cour européenne de justice à exercer sa juridiction sur ces questions à l’avenir. Et enfin, le gouvernement fait preuve de pragmatisme. J’ai déjà annoncé qu’il n’est pas question que nous exposions le Royaume-Uni au risque de se trouver en infraction – et à des amendes qui peuvent se monter à des millions et des millions de livres sterling – en restant lié par des mesures qu’il ne nous est tout simplement pas possible de mettre en œuvre dans les délais prescrits. Cela serait absurde.

Dans de nombreux domaines, les mesures en question concernent des normes minimales en matière de droit pénal. Dès avant leur adoption, le Royaume-Uni était déjà en conformité avec la majeure partie de ces normes lorsqu’il ne les avait pas dépassées. – et il va continuer le rester, que ces normes nous lient ou non.

Positions des services de police

Les populations sont devenues plus mobiles ces dernières années, et il en est de même pour la criminalité. Le gouvernement a sollicité et écouté avec grande attention les positions de nos services qui sont chargés de la réprimer. Nous sommes bien conscients que certaines des mesures sur lesquelles va porter la décision d’exemption fournissent à ces services des moyens importants dont ils ont besoin pour la protection de la population britannique. Le gouvernement a retenu 35 mesures auxquelles nous demanderons à ré-adhérer au nom de l’intérêt national.

Cet ensemble de mesures – sur lesquelles nous nous proposons de commencer des discussions avec la Commission européenne et les autres Etats-membres – est détaillé dans le document soumis au Parlement (Command Paper No 8671) qui est publié aujourd’hui même. Je voudrais être parfaitement claire : ce qui doit s’ensuivre, c’est un processus de négociation avec la Commission européenne et les autres Etats-membres, et ce sont ces négociations qui vont décider de la liste finale des mesures auxquelles nous demanderons officiellement à ré-adhérer. Mais nous avons promis que nous énumérerions clairement ces mesures et que nous donnerions aux membres de la Chambre l’occasion de les examiner avant de leur demander de se prononcer par un vote – et c’est précisément ce que nous avons fait.

Monsieur le Président, l’une des mesures auxquelles nous chercherons à ré-adhérer – et sur laquelle je sais que bon nombre de membres de cette Chambre ont des opinions bien arrêtées – porte sur le Mandat d’arrêt européen.

Je suis d’accord avec nos services et instances judiciaires pour considérer que le Mandat d’arrêt européen constitue un instrument précieux lorsqu’il s’agit de renvoyer au Royaume-Uni les auteurs de crimes et délits. L’instrument juridique existant avant ce mandat – la Convention européenne d’extradition de 1957 – comportait de sérieux inconvénients. Le Mandat d’arrêt européen nous a permis d’obtenir, d’accélérer et de mener à leur terme les procédures d’extradition – comme l’a démontré le cas d’Osman Hussain, l’un des auteurs d’un attentat à la bombe qui avait échoué à Londres en juillet 2005, qui a été extradé d’Italie au Royaume-Uni en moins de huit semaines.

Plus récemment, Jeremy Forrest, l’enseignant qui a été condamné le mois dernier pour s’être enfui en France avec l’une de ses élèves, a été extradé au Royaume-Uni moins de trois semaines après son arrestation.

Mandat d’arrêt européen

Depuis la seule année 2009, le Mandat d’arrêt européen a permis d’extrader du Royaume-Uni 57 individus soupçonnés de mauvais traitements à enfants, 86 autres soupçonnés de viol et 105 autres soupçonnés de meurtre. Au cours de la même période, ce sont 63 individus soupçonnés de mauvais traitements à enfants, 27 de viol et 44 de meurtre qui ont été extradés vers le Royaume-Uni pour y être inculpés. Nombre de ces suspects n’auraient probablement jamais été extradés vers la Grande-Bretagne s’il n’y avait eu le Mandat d’arrêt européen. Il est de notre devoir à l’égard de leurs victimes, et de leurs proches, de traduire ces individus devant les tribunaux.

Toutefois, le Mandat d’arrêt européen ne va pas non plus sans certains problèmes, comme l’ont éloquemment expliqué certains membres de cette Chambre. Le précédent gouvernement a eu huit ans pour répondre à ces préoccupations, mais il n’a rien fait.

Le gouvernement actuel est passé à l’action, et je propose aujourd’hui des protections supplémentaires pour remédier à ces problèmes tout en améliorant les mesures de protection au bénéfice de ceux dont l’extradition est réclamée, s’agissant notamment de ressortissants britanniques

Nombre de membres de cette Chambre ont expliqué la manière dont le Mandat d’arrêt européen a été utilisé de manière disproportionnée en rapport avec des infractions très mineures. Je vais remédier à cette situation en introduisant des amendements au projet de loi sur les comportements antisociaux, la criminalité et la police – actuellement en seconde lecture – de sorte que le Mandat d’arrêt européen puisse être refusé en rapport avec des infractions mineures. Cela devrait mette un coup d’arrêt à des affaires comme celle de Patrick Connor, qui a été extradé pour s’être trouvé, avec deux amis, en possession de quatre faux billets de banque.

Extradition

Nous allons aussi collaborer avec les autres Etats pour mettre en application les amendes qu’ils auront prononcées et pour garantir qu’à l’avenir, ce soit une décision d’enquête européenne qui soit utilisée à la place du Mandat d’arrêt européen. Cela voudrait dire que les services de police et les parquets mettent en commun les preuves et éléments d’information dont ils disposent, sans demander l’extradition d’un suspect lors de la phase d’enquête.

D’autres membres de cette Chambre ont fait part des préoccupations que leur inspire la durée prolongée et le caractère non indispensable de la détention provisoire. Je vais introduire des amendements à notre propre législation sur l’extradition afin de garantir que les résidents du Royaume-Uni ne puissent être extradés au titre du Mandat d’arrêt européen que si l’Etat qui demande l’extradition a déjà décidé de les inculper et de les traduire devant ses tribunaux, à moins que la présence de la personne concernée soit requise dans cette juridiction pour que ces deux décisions soient prises.

Bon nombre de membres, et notamment le député de la circonscription d’Enfield Nord se souviendront du cas d’Andrew Symeou, qui a passé 10 mois de détention provisoire en Grèce, suivis par neuf mois supplémentaires de liberté sous caution, pour se voir finalement acquitter. Avec le changement que je vais introduire, Andrew Symeou aurait pu, lors de son audience d’extradition, soulever la question de savoir si oui ou non une décision avait été prise de l’inculper et de le traduire en justice. Cela aurait vraisemblablement empêché son extradition au stade où elle a eu lieu, ou peut-être même l’aurait empêchée tout à fait. Nous allons aussi mettre en application la décision européenne de contrôle judiciaire afin qu’il soit plus facile à des personnes comme M. Symeou d’être renvoyées sous caution au Royaume-Uni.

D’autres membres de cette Chambre sont préoccupés par le fait que l’on puisse être extradé pour des actes qui ne tombent pas sous le coup de la loi britannique. Je vais modifier notre législation pour qu’il soit bien clair que dans les cas où une partie des actes incriminés ont eu lieu au Royaume-Uni, et ne tombent pas sous le coup de la loi britannique, le juge doit refuser l’extradition en rapport avec ces actes.

J’ai également l’intention de faire meilleur usage des protections existantes afin de les renforcer. Par conséquent :

  • Je vais garantir que ceux qui acceptent d’être extradés ne perdent pas leur droit à ne pas être poursuivis pour d’autres infractions, ce qui réduira tant les frais que les délais. Nous proposons que la Décision-cadre sur le transfèrement des détenus soit utilisée dans toute l’étendue de sa portée afin que les citoyens du Royaume-Uni qui ont été extradés et condamnés puissent être renvoyés ici pour y purger leur peine.

  • Lorsqu’un ressortissant du Royaume-Uni a été jugé et condamné à l’étranger, par exemple par contumace, et se trouve faire l’objet d’un Mandat d’arrêt européen, nous demanderons, avec son accord, que le Mandat soit retiré et nous utiliserons à la place le dispositif de Transfèrement des détenus. Cette modification aurait empêché l’extradition de Michael Binnington et celle de Luke Atkinson – qui n’avaient été extradés à Chypre que pour être renvoyés au Royaume-Uni six mois plus tard.

  • Afin de prévenir l’extradition de manière plus générale, j’ai l’intention soit de permettre le transfèrement temporaire d’une personne consentante pour qu’elle puisse être interrogée par les autorités de l’Etat qui demande l’extradition, soit de permettre à cette personne de répondre aux questions par des canaux comme celui de la téléconférence tant qu’elle se trouve au Royaume-Uni. Lorsque ces personnes sont innocentes, cela devrait déboucher sur le retrait de la demande d’extradition.

Il s’agit là, dans tous les cas, de modifications que l’on peut apporter au droit britannique – et qui auraient pu être apportées par le parti de l’autre bord pendant qu’il était au gouvernement. La coopération est d’une importance vitale face à la criminalité transfrontalière, mais il nous faut aussi préserver les droits des citoyens britanniques et c’est ce que vont faire les modifications que nous proposons.

Europol

Avant de conclure, je sais bien que les membres de la Chambre aimeraient connaître notre position concernant le nouveau Règlement Europol. Permettez-moi de dire que je reconnais pleinement l’excellent travail accompli par Europol et son directeur britannique, Rob Wainwright. Les membres de cette Chambre se rappelleront peut-être l’Opération Golf, conduite conjointement par Europol et la police londonienne, qui a démantelé une bande spécialisée dans le trafic d’êtres humains basée à Ilford, ce qui a permis la libération de 28 petites victimes et l’arrestation de 126 suspects. C’est pour ce type de raison que nous proposons de ré-adhérer à la mesure Europol existante.

S’agissant de la nouvelle proposition, le gouvernement a aujourd’hui même déposé une motion qui va servir de base à un débat sur le bilan de la subsidiarité et des compétences respectives de l’UE et du Royaume-Uni, bilan qui aura lieu dans cette Chambre en séance plénière la semaine prochaine, et qui fera suite au débat et au vote sur le projet dont j’ai tracé aujourd’hui les grandes lignes. La motion déclare que nous devrions adhérer à cette règlementation une fois qu’elle aura été adoptée par l’UE, à condition qu’Europol ne se voie pas conférer le pouvoir d’imposer aux instances judiciaires nationales de lancer des investigations ou de partager des données qui seraient en conflit avec les intérêts de la sécurité de notre pays.

Monsieur le Président, c’est pour des raisons de politique publique, de principe et de pragmatisme que je suis convaincue qu’il est dans l’intérêt national d’exercer le droit d’exemption du Royaume-Uni et de ré-adhérer à un nombre beaucoup plus réduit de mesures propres à faciliter notre coopération avec nos voisins européens dans la lutte contre les infractions les plus graves et le crime organise. Je suis également convaincue qu’il appartient au gouvernement britannique de trouver le bon équilibre entre le soutien au respect de la loi et la protection de nos libertés traditionnelles. Ce que j’ai exposé aujourd’hui va permettre d’atteindre ces deux objectifs et je soumets la présente déclaration à la Chambre.

Publié le 9 July 2013