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G8 : lettre du Premier ministre David Cameron

Dans cette lettre adressée aux Chefs d'Etat et de gouvernement des pays membres du G8 le 1er janvier 2013, David Cameron établit les priorités de la présidence britannique du G8.

Cela a été publié dans le cadre du 2010 to 2015 Conservative and Liberal Democrat coalition government
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Au moment où le Royaume-Uni prend la présidence du G8, je souhaitais vous écrire personnellement afin d’engager avec vous le débat sur ce que nous pouvons accomplir ensemble. Nous nous rencontrerons en juin à Lough Erne, en Irlande du Nord. Il s’agit là d’une région dont les perspectives ont été transformées par le processus de paix ces 20 dernières années – et le fait que nous puissions y organiser un Sommet du G8 témoigne des progrès accomplis.

Le monde va manifestement rester aux prises avec une grave incertitude économique en 2013. La première de nos priorités va consister à faire face aux difficultés qui se présentent dans nos pays respectifs. Mais en tant que leaders des pays qui ensemble concentrent environ la moitié du PIB de la planète, les normes ambitieuses que nous fixerons et les mesures audacieuses que nous prendrons en œuvrant ensemble à travers le G8 pourront faire une différence tangible en relançant les économies et en soutenant la prospérité, dans nos propres pays comme dans le monde.

J’espère qu’à Lough Erne nous serons en mesure de saisir cette occasion. Mes priorités essentielles pour le Sommet sont de trois ordres : de nouveaux progrès concernant le commerce international, un meilleur respect des obligations fiscales et l’amélioration de la transparence. Sur tous ces sujets, j’en suis convaincu, le G8 peut jouer un rôle particulier, en s’appuyant sur notre attachement à l’ouverture, que ce soit celle des économies, des gouvernements ou de la société, afin de soutenir l’entreprise et de générer de la croissance économique.

Mais parvenir à tout cela va exiger une détermination politique ferme et des mois de travail sur les détails de ces diverses politiques de la part de nos équipes. Ce G8 ne va pas être le type de sommet où l’on va simplement sortir les carnets de chèque à la onzième heure, s’engager sur certains montants et appeler cela un succès. Ce dont il s’agit aujourd’hui, ce sont des mutations profondes dans nos économies et des règles qui gouvernent les relations qu’elles entretiennent entre elles. Vu l’ampleur de cette ambition, je suis convaincu que pour réussir, il faut que nous engagions dès maintenant le débat sur ces mutations.

Tout d’abord, concernant le commerce international, l’ordre du jour de l’année qui commence est extrêmement chargé – avec par exemple la possibilité d’un accord entre l’Union européenne et le Canada, l’ouverture de négociations entre l’UE et le Japon, et la Russie qui approfondit son intégration dans le système commercial mondial alors qu’elle entame sa seconde année en tant que membre de l’Organisation mondiale du commerce. A l’échelle du monde, nous pouvons aussi espérer réduire les formalités et la bureaucratie aux frontières, y compris grâce à un accord sur la facilitation des échanges internationaux lors de la réunion ministérielle de l’OMC en décembre, ce qui donnerait aussi un élan supplémentaire à notre soutien à la libéralisation des échanges en Afrique. En outre, l’Europe et l’Amérique contribuant ensemble à un tiers des échanges mondiaux, le plus beau des succès pourrait bien être l’ouverture de négociations sur un accord commercial entre l’UE et les Etats-Unis.

Il s’agit là de perspectives d’une importance vitale pour la croissance mondiale, et j’espère que nous tous, au sein du G8, pourrons faire preuve de leadership en la matière – et notamment en collaborant avec le secteur privé dans chacun des secteurs de nos économies afin de mobiliser les soutiens nécessaires à ces accords, et en prenant appui ouvertement sur la responsabilité directe qui est la nôtre, en tant que gouvernants, pour nous attaquer franchement aux points de désaccord et pour les résoudre.

En deuxième lieu, concernant la fiscalité, nous savons bien qu’avec la mondialisation, aucun pays n’est en mesure, par lui-même, de s’attaquer effectivement à l’évasion fiscale et autres techniques plus agressives. Mais puisque nous formons un groupe de huit économies majeures, nous avons l’occasion de galvaniser des interventions collectives à l’échelle internationale. Nous pouvons montrer la voie en partageant les éléments d’information permettant de mettre fin aux abus dans le système fiscal international, y compris dans les pays en développement, de sorte que les gouvernements se trouvent en mesure de collecter les impôts qui leur sont dûs. Nous pouvons œuvrer ensemble pour faire adhérer davantage de pays aux normes internationales. Et nous pouvons aussi examiner dans quelle mesure ces normes elles-mêmes peuvent être renforcées – que ce soit en améliorant celles qui existent ou en en envisageant d’autres. Il s’agit là de questions complexes, qui vont exiger des consultations honnêtes et détaillées sur l’approche la plus adaptée. Mais je suis convaincu qu’en tant que chef d’Etat ou de gouvernement, chacun de nous a intérêt à pouvoir dire à ses contribuables respectifs, qui travaillent dur et paient la part d’impôts qui leur revient, que nous allons nous assurer que tous les autres en font autant.

Troisièmement, s’agissant de nos partenariats avec les économies moins avancées ou émergentes, je crois que nous devons innover dans la pratique en mettant l’accent sur la transparence, la responsabilité et l’ouverture des gouvernements. Trop de pays en développement se trouvent entravés par la corruption – phénomène que peuvent renforcer ou même encourager les mauvaises pratiques dans les relations d’affaires et le manque de transparence chez ceux qui entretiennent des liens commerciaux avec ces pays.

Les efforts collectifs que nous avons accomplis depuis des années en matière de développement donnent au G8 à la fois la légitimité et la responsabilité voulues pour faire progresser les choses à l’échelle internationale en se concentrant non seulement sur l’aide au développement, mais aussi sur les dynamiques de fond de la croissance et de l’emploi propres à faire sortir ces populations de la pauvreté une fois pour toutes.

Je souhaiterais donc que le G8 continue à améliorer la transparence de nos flux d’aide au développement, afin que les populations des pays en développement soient en mesure de rendre leurs gouvernements responsables de leurs actes concernant le bon usage de ces fonds, et que chaque foyer puisse se rendre compte de l’effet que peut avoir cette générosité. Ce travail de responsabilisation est essentiel si nous voulons maintenir la coalition mondiale pour le développement dans laquelle nous sommes engagés, en nous appuyant sur la Nouvelle alliance pour la sécurité alimentaire et la nutrition conclue l’an dernier, et en intensifiant la lutte contre la faim par un encouragement à la production d’une alimentation plus riche qui soit mise à la portée des foyers et à des prix abordables.

Le G8 est également en mesure d’appuyer les fondements mêmes de la croissance, y compris l’état de droit, l’absence de conflit et de corruption, et la mise en place de droits de propriété et d’institutions plus solides – ce que j’ai appelé le “fil conducteur” qui, avec des économies et des sociétés plus ouvertes, donne la meilleure base possible à la croissance. J’espère que nos travaux vont montrer qu’il ne s’agit pas là seulement de ce que les pays en développement font eux-mêmes. Il faut que nous, pays développés, collaborions avec ces derniers pour empêcher le blanchiment d’argent et pour éliminer les paiements illicites et la corruption. Il nous appartient aussi de nous pencher sur les moyens d’améliorer la transparence – y compris grâce à l’Initiative pour la transparence dans le secteur du bâtiment ainsi qu’à de nouvelles idées comme celle d’un partenariat mondial sur la transparence en matière foncière.

Il est inévitable que des questions vont se poser sur ce que chacun d’entre nous est prêt à approuver. J’espère que nous allons pouvoir être ambitieux. C’est dans cet esprit que j’ai déjà donné le signal de quelques évolutions importantes dans la position qui est celle du Royaume-Uni. Ainsi par exemple, alors que les Etats-Unis ont déjà accepté d’adhérer à l’Initiative sur la transparence des industries extractives, il reste encore à la Grande-Bretagne comme à tous les autres pays du G8 à souscrire à ce dispositif de portée mondiale qui permet de s’assurer qu’à travers toute la planète les populations bénéficient de l’extraction des ressources naturelles de leur propre pays. Nous devons changer cela. Nous ne pouvons pas appeler les autres pays à mettre en œuvre ces normes supérieures si nous ne sommes pas prêts à le faire nous-mêmes. C’est pourquoi j’ai demandé que la position du Royaume-Uni en la matière fasse de toute urgence l’objet d’un réexamen.

Ces décisions ne sont pas de celles que l’on peut tout simplement laisser à nos experts techniques. Elles appellent de notre part un engagement décisif. A dire vrai, sur tous ces sujets, nous savons bien quels sont les obstacles à un accord et il nous faut trouver la volonté politique nous permettant de les prendre à bras le corps. En collaborant ensemble au cours des mois qui viennent, je suis convaincu que nous le pourrons.

Je serai heureux de débattre de ces questions avec vous et de vous accueillir à Lough Erne cet été.

Bien à vous, David.

Publié le 1 January 2013