Discours

Discours de l'ambassadeur britannique en RDC à l'occasion de la journée internationale de lutte contre la corruption

Discours de l'ambassadeur britannique Graham Zebedee à l’occasion de la Journée Internationale de lutte contre la corruption célébrée le 9 décembre 2015 à Kinshasa, RDC.

Graham Zebedee, Ambassadeur britannique en RDC

“Je voudrais avant toute chose sincèrement remercier les organisateurs de ce forum de m’avoir invité à parler aujourd’hui. C’est un grand plaisir de voir autant de représentants du secteur public, de la société civile et du secteur privé ici, à l’occasion de la célébration de la journée internationale de la lutte contre la corruption.

Je suis convaincu que ni la guerre, ni l’instabilité, ni même la question des élections (dont on parle beaucoup ici), ne pourraient constituer un plus grand risque pour le succès futur de la République Démocratique du Congo que la corruption.

L’importance de la lutte contre la corruption a été soulignée nombre de fois par le Président de la République et par le Gouvernement. Le combat contre la corruption a été au cœur de la stratégie de développement de plusieurs gouvernements. Il va sans dire que mon pays, en tant que le second plus grand partenaire de développement ici, soutient pleinement les efforts du gouvernement dans ce domaine.

Cependant, bien entendu, vous, en tant qu’entreprises et organisations de la société civile, jugez les performances des gouvernements non pas par le contenu des discours ou par les agendas des conférences organisées dans les hôtels de Kinshasa, mais par les résultats. Quels sont ces résultats ?

La mesure de la corruption que la communauté internationale utilise le plus souvent est l’indice de perception de la corruption de Transparency International. La RDC est actuellement 154ème sur 175 pays. Ce classement est resté constant pendant les trois dernières années. La corruption a également un grand impact sur la facilité d’entreprendre les affaires. Le rapport récent « Doing Business » de la Banque Mondiale a classé la RDC un des meilleurs réformateurs, mais il reste 184ème sur 189 pays. Il y a un conflit majeur dans 3 des 5 pays qui viennent après la RDC dans ce classement.

De par sa nature, il n’est pas possible de connaître comment toutes les formes de corruption opèrent en RDC, le secret étant la caractéristique principale de la corruption. Mais nous pouvons voir les résultats. Pas seulement sur le climat des affaires, mais également sur les finances publiques. En 2013 le gouvernement de la RDC a dépensé un très faible montant par rapport à la hauteur du PIB de la RDC. Où est parti le reste d’argent? La réponse est claire.

• Une grande partie des taxes qui auraient pu être collectées ne l’a pas été.

• Une partie des taxes collectées ne sont pas allées dans le budget du Gouvernement

• Une partie de l’argent qui est allée au budget du Gouvernement n’a pas été dépensée sur les activités du Gouvernement.

La corruption joue un grand rôle dans tous les trois cas.

Le résultat est que le gouvernement ne peut dépenser qu’un faible montant sur, par exemple, l’éducation et la santé des congolais. Et les partenaires internationaux, les ONG, la diaspora congolaise et les églises doivent combler le déficit.

Donc, il y a beaucoup à faire. Une partie de ce travail ne peut être fait par le gouvernement qu’avec l’appui des partenaires internationaux. Et il y a certainement des réformateurs dans le gouvernement qui veulent faire cela. Je salue leurs braves efforts.

Mais le secteur privé a également un rôle vital à jouer dans la lutte contre la corruption. Chaque jour, les entreprises font face à des demandes de paiements illégaux, en vue de : - réduire le montant d’une taxe illégale, - gagner un contrat, - faire passer leurs biens/marchandises à un poste frontalier, - s’assurer qu’il n’y a pas de problèmes avec les autorités locales, - garantir l’approbation de leur projet.

Tous ces paiements sont illégaux pour une entreprise opérant sous la loi britannique et sous les lois de plusieurs autres pays. Mais tous les pays ne disposent pas de pareilles lois.

Si les entreprises refusent de payer, elles pourraient en souffrir à court terme. Mais quand elles paient, tout le monde, y compris la population congolaise, en souffrira à long terme.

C’est la raison pour laquelle le Royaume Uni donne son plein soutien à cette initiative du secteur privé contre la corruption. La voix des entreprises doit être entendue, et surtout sur la question de corruption. S’il y a de véritable volonté politique, on peut faire beaucoup de progrès. Sinon, on n’en fera pas.

A moins que la RDC ne détruise la corruption, la corruption détruira la RDC.

Je vous remercie.”

Publié le 14 December 2015